Samedi 1er octobre 2011 a eu lieu l'inauguration de la stèle à la mémoire des déportés de Beaumont-en-Argonne
Behar Raphaël 1893 coupeur de casquettes
Ber Peretz 1899 charpentier
Mandelsaft Chaïm 1920 coiffeur
Mandelsaft Silig 1884 friseur
Mandelsaft Sabine 1923 coiffeuse
Pitkowski Saul 1898 tailleur
Pitkowski Henri 1934 écolier
Reznicow-Winer Ita 1906 finisseuse
Reznicow Henri 1931 écolier
Symckowicz Isaac 1898 tailleur piqueur
Szajer Aba 1891 repasseur
à l'invitation de Guy Joseph, maire et de l'AFMD, en présence de Béatrice Obara sous-préfet, de Marie-Agnès Hyon-Paul directrice de l'ONACVG et de Pierre Vernel vice-président du Conseil général, les nombreux participants ont été très marqués par le caractère exceptionnellement solennel et poignant de cette cérémonie qui s'est déroulée dans le recueillement, en présence de survivants des familles Ber, Mandelsaft et Weisz, et des enfants des Justes les ayant sauvés : familles Ducloux, Tinant, Quatreville, Pelzer et André.
L'objectif prioritaire de la transmission de la mémoire de la déportation a été atteint grâce à la participation remarquée des élèves de l'école du village, sous la direction de Pascal Chaffaud. La lecture des souvenirs d'une enfant de Juste a été magistrale (lire le compte rendu du journal L’Union).
Rectificatif : c'est Michel Piquard, autrefois camarade de classe des écoliers juifs déportés de Beaumont, qui a lu le poème écrit par le regretté Daniel Dion.
Extrait du discours prononcé par C.Dollard-Leplomb pour l'AFMD :
....Ainsi, dans la nuit du nazisme, la lumière des Justes s’est levée sur la France, où on relève le chiffre de 25% de Juifs déportés alors qu’il s’élève à 80% voire 90% dans le reste de l’Europe. Au péril de leur vie, les Justes ont agi en conscience, et avec leur cœur, sous le coup d’une exigence qui primait toutes les autres. Beaucoup sont demeurés anonymes, n’ont pas cherché la reconnaissance. Ils ont souvent été aidés par leur entourage, l’armée des ombres modestes de la Résistance, laquelle a payé aussi un lourd tribut à la déportation.
Grâce aux Justes, nous pouvons accueillir aujourd’hui :
Cécile et Micheline Ber sauvées avec leur mère par Mme Clémence Ducloux ,
Daniel Weisz, sauvé ainsi que ses parents par Raymond Tinant et Mme Madeleine André de la ferme de la Forge.
Il y avait aussi Charlotte Rozencwajg 11 ans, sauvée par Mme Léa Quatreville, postière du village (fils présent), tandis que son père était sauvé par Mr François Pelzer, de la ferme de Maugré à Carignan.
Il y avait la petite Rose Cola, 5 ans, et sa sœur Chana, 11 ans sauvées avec leur sœur Fanny 22 ans et leurs parents, certainement par Mr Louis Adam, bûcheron. Malheureusement, deux enfants : Henri Pitkowski, 10 ans, et Henri Reznicow, 13 ans, partent dans le convoi des Ardennes, avec 39 enfants de moins de 18 ans et 32 jeunes de 18 à 25 ans. Le plus jeune, René Kornberg, né à Sedan le 15 Juillet 1943, n’avait que 5 mois et demi.
Je vous laisse méditer cette question à jamais sans réponse : Qu’auraient fait de leur vie les 11 400 enfants de France et les milliers d’enfants d’Europe exterminés à Auschwitz ? Quelques grands médecins ? Peut-être des biologistes qui nous manquent aujourd’hui ? On voit là que « Tuer les autres, c’est se tuer soi-même » et que le crime contre l’Humanité s’est perpétré contre nous tous.
Merci ! ... aux gens de Beaumont, d’avoir gravé le nom des déportés dans le marbre : c’est leur rendre un petit peu la tombe à laquelle ils n’ont même pas eu droit. C’est pour nos enfants, les enfants de France, d’Europe et du monde, pour les générations à venir que nous devons combattre l’ignorance. Apprenons-leur ce que les Humanistes ont toujours su, et que les scientifiques, comme Yves Coppens, ont confirmé récemment : il n’y a pas plusieurs races d’Hommes, il n’y a qu’une seule espèce humaine Homo Sapiens. Enseignons l’Histoire, et invitons notre jeunesse, comme c’est le cas aujourd’hui, aux commémorations sur les lieux de mémoire. Il faut plus que jamais réunir activement autour de la devise de notre République Française : Liberté Egalité Fraternité, tous ceux qui la défendent, quelles que soient leur religion, leur origine ou leur ethnie, parce que nous ne serons jamais trop nombreux pour ce faire. Au nom des Amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation, je vous remercie.
Beaumont-en-Argonne, le 1er octobre 2011 Inauguration de la stèle à la mémoire des ouvriers agricoles Juifs déportés à Auschwitz.
Bernadette Ducloux-Cinkus, fille de Clémence qui sauva Cécile Ber (à droite), ses deux sœurs et sa mère, tandis que le père, Peretz Ber, était raflé et déporté sans retour.
Bernadette Ducloux, très émue après que la jeune Pauline, élève de l'école de Beaumont , ait lu ce texte qu'elle a écrit après-guerre. Il s'agit de ses souvenirs d'écolière et de son meilleur camarade de classe : Henri Pitkowski, 9 ans, déporté sans retour.
Texte lu par Pauline :
…peu de temps après, un gros camion s’arrête devant la maison…
la bâche est relevée, des gens à l’intérieur sont habillés comme pour aller à la messe…
je reconnais des enfants.
Mais où ils vont ? Personne ne parle à l’intérieur.
C’est comme si des nuages entraient en moi, je crois que je respire mal.
C’est Henri qui arrive.Pourquoi il part sans rien me dire ?
Non, je ne veux pas !
Non, pas Henri ! Je suis certaine qu’il n’a rien fait de mal .
Je l'appelle, je lui tends la main.
Prends-la, je t'en prie, reste avec moi s'il-te-plaît.
Tu seras mon frère, je le dirai. Elle voudra bien et lui aussi.
Pourquoi ils rient les soldats ?
Henri ne rit pas lui. Les soldats le soulèvent et le mettent dans le camion.
Mais qu’est-ce qu’il y a dans ma tête qui me fait si mal ? Est-ce que je crie ?
Est-ce que je rêve ? Alors vite, Jésus ! fais-moi un rêve à l’envers.
Et demain je donnerai la main à Henri pour aller à l’école, ou pour cueillir des framboises derrière le lavoir ...
Jésus ...mais qu'est-ce que tu attends ? Je pleure à cause de toi.
…C’est fini. Le camion est parti. C’est le silence sur toute la terre.
Je sens un « plus jamais » autour de moi.
Je suis une toute petite fourmi presque écrasée. »
Voici deux extraits de messages adressés par des descendants d'enfants cachés dont
le père a été déporté :
Grâce à vous, nous avons vécu et partagé un moment intense d’émotion, de communion et de transmission de notre mémoire, Samedi dernier à Beaumont en Argonne. J’ai été ravie de faire votre connaissance, et de rappeler à notre souvenir des personnes qui ne sont plus là pour beaucoup, mais dont les actions remarquables ont permis de sauver des innocents, nous permettent à nous-mêmes d’être présents, et enfin nous permettent de garder espoir dans l’humanité, malgré tout.
Après cette cérémonie de samedi 1er octobre, nous sommes "différents", car il y a eu une grande fraternité entre tous les participants et l'on a pu évoquer le courage des Justes des Ardennes. Notre peine a été partagée en luttant contre l'oubli. La présence des enfants de Beaumont et de leur instituteur pérennise le travail que vous avez accompli. Nous vous remercions sincèrement, car cette plaque est désormais un lieu de recueillement. Les déportés étaient dans le même camion bâché, lorsqu'ils ont été arrêtés et sont ensemble sur cette plaque presque blottis et reconnus au grand jour. Maman m'a dit tout à l'heure que c'est comme une tombe, ce qui nous a cruellement manqué. Merci, merci. L'accueil des Beaumontais et Beaumontaises nous a touchés et était exceptionnel.